Innover en formation agricole en Arménie

Margarit Poghosyan, directrice adjointe du développement et des innovations du secteur agricole au Collège régional du Tavouch Patrick Devedjian (Arménie), était en formation en France du 17 février au 2 mars 2024, notamment auprès de Catherine Demesy, directrice de l’EPL Naturapolis à Châteauroux.

Le temps de formation a été organisé dans le cadre d’un partenariat mené par Max Delpérié, ancien directeur d’établissement agricole public, chargé de mission pour le Fonds arménien de France.

Catherine Demesy, comment avez-vous préparé ce temps d’échange et de formation avec votre collègue arménienne ?

Sollicitée par Max Delpérié pour accueillir Margarit Poghosyan, j’ai accepté avec plaisir. Nous avions déjà partagé du temps lors de sa première mission en 2023 lorsque j’étais directrice adjointe au lycée agricole Les Vaseix, à Limoges, sur le pilotage pédagogique et ce temps partagé avait été très riche d’échanges.
Cette fois-ci nous avons élaboré un programme complémentaire sur 4 thématiques : pilotage financier, ressources humaines, projet d’établissement et coopération internationale. Pendant quatre jours, Margarit m’a suivie dans mon quotidien et a participé à mes différentes réunions pour étudier mon mode de management. Nous avons pris une demi-journée pour visiter l’établissement et aller à la rencontre des équipes et des jeunes, une demi-journée pour échanger autour du suivi financier de l’établissement, une demi-journée sur les ressources humaines. Et nous avons organisé une réunion avec l’équipe coopération internationale de Naturapolis pour étudier ensemble les différentes possibilités de partenariats entre nos deux établissements. Nous avons également échangé autour de la feuille de route stratégique de l’établissement que nous avons rédigée avant de mettre en place l’évaluation de l’établissement. Au-delà de la présentation de nos pratiques, nous avons essayé de voir ce qui était transposable et ce qui ne l’était pas et avons abordé l’axe de la formation, nécessaire pour faire évoluer les pratiques de nos collaborateurs.

Catherine Demesy et Margarit Poghosyan.

Qu’est-ce qui vous a intéressée dans cette démarche ?

Ces quatre journées ont été très riches d’échanges, j’ai pris autant de plaisir à transmettre mes pratiques qu’à profiter du regard extérieur précieux et pertinent de Margarit.
Au-delà des liens d’amitié qui se sont tissés lors de ces deux missions de Margarit Poghosyan en France, pouvoir échanger sur mes pratiques et stratégies, sur mon ressenti et mes questionnements est une vraie richesse pour une nouvelle directrice d’établissement. Cela permet de prendre du recul sur son quotidien et de bénéficier de conseils bienveillants. J’espère que Margarit a pu s’enrichir autant que moi de nos échanges !

Margarit Poghosyan, vous avez passé quelques jours auprès de la directrice de l’EPLEFPA Naturapolis de Châteauroux : quelles sont les raisons de ce choix ? Quels étaient les objectifs de ce temps de formation ? Qu’en retenez-vous ?

Je connais Catherine Demesy, la directrice de l’EPLEFPA Naturapolis de Châteauroux, depuis le mois de janvier 2023 quand j’ai fait ma première formation professionnelle sur le management pédagogique au Lycée agricole de Limoges Les Vaseix où elle était directrice adjointe. Catherine Demesy a repris un nouveau poste de directrice du Lycée Naturapolis depuis la rentrée 2023-2024. Les raisons de ce choix étaient liées à son nouveau poste et à l’expérience de janvier 2023, initiée et organisée par Max Delpérié.

Visite de l’EPL Naturapolis à Châteauroux.

Les objectifs de ce deuxième temps de formation étaient multiples, il s’agissait en particulier d’avoir le regard d’une nouvelle directrice d’EPLEFPA suite à sa nomination par rapport au diagnostic de l’établissement, à son plan d’action, à l’évolution du projet d’établissement et à la mise en œuvre de projets pédagogiques, ainsi qu’au management des ressources humaines et financier.
En janvier 2023, lors de mon premier stage au lycée agricole des Vaseix, j’étais impressionnée par le nombre de réunions, de discussions et d’échanges entre les responsables pédagogiques (directrice adjointe, CPE et professeurs principaux), par la participation des élèves aux différents conseils (de classe et d’administration) ainsi que par l’événementiel au sein de l’établissement. Par la suite, à mon retour, j’ai initié des conseils et des réunions pédagogiques plus réguliers avec les acteurs concernés : équipes administrative et pédagogique, réunions de classe et de parents. Le chargé de mission, Max Delpérié, a suggéré un agenda de semaines thématiques (de rentrée, de santé, de francophonie) que nous sommes en train de faire en les adaptant toujours au terrain. Nous avons démarré le travail du Conseil de perfectionnement dont le but est de synchroniser les actions des responsables du recrutement, de l’orientation professionnelle, de la communication et de l’administration appuyées par la présence des experts français. Effectivement, l’une des actions les plus importantes c’est la mise en place et le développement de la qualité des travaux pratiques sur l’exploitation agricole que nous continuons à élaborer. Nous avons pu positionner notre Lycée comme centre francophone de la région du Tavouch et créer des relations plus étroites avec les exploitants, les entités locales (Préfecture, Mairie) et les services de l’Ambassade de France en Arménie.

Un objectif complémentaire concerne la coopération internationale dont la possibilité d’échanges professionnels… Compte tenu des différences énormes entre les modèles de l’enseignement, de l’éducation, des financements et autres, le plus essentiel pour moi était de comprendre les fonctionnements et d’essayer de les adapter aux réalités existantes de mon pays. Par ailleurs, c’était une opportunité de mettre en place les premiers échanges entre nos deux établissements au niveau de la coopération internationale.

Vous avez ensuite participé au Salon international de l’agriculture à Paris : quels sont les interlocuteurs que vous avez eu l’opportunité de rencontrer ? Quelles avancées dans vos projets ces échanges ont-ils permis ?

Au SIA 2024.

L’Aventure du vivant au SIA 2024.

Le choix de la période de ma formation était lié aussi à la 60ème édition du Salon international de l’agriculture de Paris.

Les objectifs premiers étaient de participer au Salon et en voir l’organisation : conférences, échanges, ateliers, partage de savoir-faire, mais aussi d’observer les concours et la présentation des animaux, des produits et des lycées agricoles.
J’ai pu découvrir la communication du Ministère de l’agriculture en direction des jeunes (découverte des métiers et des formations) par la visite du véhicule qui parcourt toutes les régions de France avec le slogan l’Aventure du Vivant.
Enfin, j’ai pu communiquer auprès de représentants de lycées au niveau de partenariats éventuels en coopération internationale.

L’autre point important était la réunion avec des collègues chargés de la coopération internationale à la DGER. La réunion du 27 février, avec Rachid Benlafquih, Vanessa Forsans, Évelyne Bohuon (animatrice du réseau Arménie), a permis de formaliser les échanges préalablement préparés avec Max Delpérié.

Nous avons défini les étapes suivantes de nos actions, en précisant les projets en cours et à venir, en définissant les objectifs de moyen et court termes, l’appel à manifestation d’intérêt pour de l’expertise complémentaire, et le travail à mener en direction de l’Agence Française de Développement et de l’Ambassade de France.

Personnellement, le plus impressionnant a été d’observer et de mesurer la motivation des jeunes et leur amour du métier d’agriculteur et des métiers connexes. Les élèves que j’ai rencontrés avec leurs enseignants ont été très intéressants et très expressifs sur leur engagement. Je retire et retiens beaucoup de points positifs afin d’en inspirer le système que nous mettons en place en Arménie.

Max Delpérié, quel est le contexte de cette coopération ?

En 2020, j’ai été approché par des responsables du Fonds Arménien de France souhaitant rencontrer des lycées agricoles. Les visites des deux lycées dont j’avais la responsabilité en Limousin ont eu lieu avec pour thème principal la présentation des actions pédagogiques induites par l’utilisation des exploitations agricoles et des ateliers technologiques des EPLEFPA.
Historiquement, les programmes de développement agricole entre la France et l’Arménie portés par le Fonds Arménien de France (FAF), association de loi de 1901 reconnue d’Utilité Publique, ont initié des actions de développement agricole créatrices d’activités économiques et d’emplois. Le FAF dispose d’équipes opérationnelles françaises sur le terrain. Le FAF, grâce au projet agropastoral du Tavush soutenu par le Conseil Départemental 92, a acquis une expérience certaine dans le domaine du développement rural depuis 15 ans. À l’initiative de Patrick Devedjian, ce projet a été initié en 2008. Il a permis de développer une ferme moderne pour l’Arménie et une fromagerie : La ferme de Lusadzor. Différentes évolutions ont été réalisées depuis. Le grand projet qui anime les membres du FAF est la création d’une école d’agriculture en référence aux lycées agricoles français avec l’appui si possible d’établissements agricoles, le soutien de la DGER et les financements entre autres de régions dont l’Île de France.
Une mission d’un groupe d’experts dont je faisais partie s’est déroulée en octobre 2021. Un partenariat entre le ministère de l’Éducation nationale arménienne et le FAF est acté avec la mise à disposition des locaux du collège régional professionnel d’Idjévan (capitale du Tavush) afin de créer un établissement de formation agricole. L’ouverture a eu lieu en septembre 2022. La ferme de Lusadzor devient de fait le lieu des travaux pratiques dispensés. Il est clair que les cursus mis en place dans le collège régional d’Idjévan et la ferme-école de Lusadzor feront partie d’un programme national de formations rénovées pour l’agriculture en Arménie dont bénéficieront toutes les régions d’Arménie si l’expérience est porteuse de sens et d’avenir. Une fondation a été créée entre le ministère de l’Éducation et le Fonds Arménien de France, co-présidée par le vice-président du Fonds. Le nom de Patrick Devedjian a été donné au collège régional d’Idjévan. Du fait de la crise Covid, les projets imaginés ont pris du retard. Depuis deux années scolaires, nous* avançons avec les équipes arméniennes d’enseignants et une directrice adjointe recrutée, je suis chargé du suivi des actions pédagogiques innovantes, de l’accompagnement professionnel et de la formation de la directrice adjointe Margarit Poghosyan.
* Jacques Bahry, expert spécialiste en formation continue et formations à distance, et moi-même.

Quelles sont les prochaines étapes de ce projet ?

Des missions d’expertise en Arménie sont proposées pour accompagner l’évolution du Collège régional d’Idjévan dans son offre de formation agricole. Trois axes sont retenus, le premier portera sur les évolutions pédagogiques des enseignements techniques en lien avec l’exploitation (apprentissages liés aux transitions agroécologiques) et l’atelier fromagerie ; le second se concentrera sur la vie scolaire d’un établissement basée sur la participation des jeunes, des partenaires selon des principes intégrant les notions de citoyenneté, d’éducation inclusive, de participation individuelle et collective et de démocratie ; enfin, le troisième axe prendra en compte, plus largement le développement territorial des métiers agricoles (installation des jeunes, formation continue des adultes, structures intermédiaires – filières – conseil en agriculture). Ainsi, pour participer à cette mission à l’automne 2024, enseignants d’agronomie ou zootechnie, directeurs d’exploitations agricoles, CPE, directeurs d’établissements pourront candidater à cet appel à manifestation d’intérêt.

Propos recueillis par Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI (Conseil Expertise Formation Agricole à l’International).

Contacts : Évelyne Bohuon, animatrice du réseau Arménie, evelyne.bohuon@educagri.fr
Stéphanie Mangin, chargée de mission Europe au BRECI/DGER, stephanie.mangin@agriculture.gouv.fr, Rachid Benlafquih, chargé de mission expertise à l’international au BRECI/DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr, Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI, vanessa.forsans@educagri.fr




WATEA-Nigéria en Saintonge

Dans le cadre du projet Woman in Agricultural Technical Education and Apprenticeship-WATEA, 12 personnels de l’enseignement technique agricole nigérian ont été accueillis en France pour un voyage d’étude, de découverte du dispositif français de l’apprentissage et de la formation agricole.

Le 11 décembre 2023, 6 directeurs et directrices et 6 responsables pédagogiques d’établissements d’enseignement technique agricole nigérians sont officiellement accueillis à la DGER par Marie-Bénédicte Peyrat, sous-directrice de l’Innovation et des Coopérations Internationales, Rachid Benlfaquih, chargé des programmes Afrique subsaharienne et Océan Indien au Bureau des relations européennes et de la coopération internationale et William Gex, animateur du réseau Nigéria. Ces derniers les ont ensuite accompagnés en Charente maritime où les attendait un programme de visites et rencontres organisées par Rodolphe Zegrar, formateur au CFAA17, selon la sollicitation du réseau CEFAGRI, en lien avec la conseillère aux affaires agricoles en poste au Nigéria, Sonia Darracq et Zaïnatou Sore du CGIAR.

Qu’est-ce que le projet WATEA ?

 Entre 2020 et 2022, dans le domaine de la Formation Agricole et Rurale (FAR), les échanges avec le Nigéria se sont développés grâce au Fonds de Solidarité pour les Projets Innovants (FSPI ) « Soutien à l’entreprenariat féminin dans le secteur agroalimentaire au Nigeria » qui a permis de former dans deux Etats, Kaduna et Oyo, directement 300 femmes agripreneuses, 60 formatrices et au final 1500 bénéficiaires.

Ainsi 3 manuels de formation ont été édités en anglais, yoruba et haoussa sur des sujets tels que : transformation de manioc ou de poisson-chat, comptabilité, processus de certification, hygiène, sécurité sanitaire des aliments, packaging et commercialisation en circuit court. Conscient de la nécessité de renforcer ses services de vulgarisation agricole, le président du Nigéria a la volonté de moderniser l’ensemble de sa filière pédagogique, depuis les établissements d’enseignement technique agricole jusqu’à l’insertion socioprofessionnelle des personnes formées afin de rendre le système attractif et de donner envie aux jeunes agriculteurs et agricultrices de s’installer.

A la demande du Ministère Fédéral du Plan, l’Agence Française de Développement (AFD) a conçu, en lien avec l’ambassade de France, un programme de rénovation, de modernisation et de développement du système  Agricultural Technical Vocational Education and Training (ATVET) nigérian dans trois Etats du Nigéria (Oyo, Benue et Plateau). Cela commence par la construction et le renforcement de la base du secteur agricole à travers la formation initiale et l’insertion socioprofessionnelle des jeunes professionnels dans l’agriculture de production et se poursuit par la formation continue des agriculteurs en exercice, de petites exploitations, pour faire face aux problèmes de sécurité alimentaire et d’auto-alimentation.

Les jeunes femmes ne sont pas attirées par l’enseignement technique agricole public, perçu comme dépassé et dépourvu de perspectives d’emplois rémunérateurs. Cependant, la demande de techniciens agroalimentaires qualifié·es est importante et croissante, offrant ainsi une opportunité aux jeunes femmes et hommes d’accéder à un emploi rémunérateur ou indépendant. Une réforme de l’ATVET au Nigeria permettrait de lutter contre le chômage et de rajeunir la population agricole vieillissante en améliorant l’employabilité des jeunes, en particulier des jeunes femmes.

Ainsi, le programme WATEA-Nigeria, entièrement financé par le  Ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères (MEAE)  via l’ambassade de France au Nigeria, vise à promouvoir le développement des compétences techniques et professionnelles des jeunes femmes, directement aligné sur les besoins des petites et moyennes entreprises (PME) agroalimentaires, comme à soutenir la croissance des entreprises agroalimentaires dirigées par des femmes ou encore à favoriser les écosystèmes entrepreneuriaux locaux et nationaux au Nigeria. La promotion des normes environnementales les plus élevées garantira la durabilité des pratiques agricoles et augmentera la productivité, tout en favorisant une participation significative des jeunes femmes.

Un voyage d’étude dans un territoire représentatif

Pour ce faire, toute une semaine de visites a été mise en place dans les EPL du territoire et les antennes de l’Agrocampus de Saintonge. La semaine a débuté par une présentation de l’établissement par les élèves de baccalauréat STAV en présence de Myriam Huet, directrice de l’Agrocampus, et de M. Amblard, président du conseil d’administration et représentant à la chambre d’agriculture et à l’AFDI (Agriculteurs Français et Développement International). La délégation a aussi été reçue par le directeur du site de Desclaude, Philippe Bizet, pour une visite des infrastructures du lycée, les étudiants ont présenté le BTS GEMEAU puis échangé autour de leur formation. Le directeur de l’exploitation polyculture élevage, Sébastien Riquart, a ensuite guidé le groupe à travers les unités de production avant de l’amener déguster, avec des élèves, yaourts, fromage et beurre de la ferme. La première journée s’est conclue par des discussions avec des apprentis en agroéquipement.

Le deuxième jour, la directrice de l’EPL de Surgères, Marie-Pierre Gousset, avec son référent coopération internationale Pierre Séchet, a proposé la visite du campus de l’alimentation et de ses ateliers (industrie laitière, de la mer, hall boulangerie-biscuiterie-viennoiserie et moulin pilote), qui s’est terminée autour de la minoterie par une dégustation de meringues et de chocolats. La visite de l’exploitation maraîchère et horticole « Aux plants et jardins » de Magalie Vinet a clôturé la journée.

A Bourcefranc, au lycée de la mer et du littoral, toute l’équipe était aux petits soins. Valérie Vial, secrétaire de direction chargée de coopération internationale, les attendait dans le hall et le directeur exploitation, Arnaud Lefèvre, a accompagné la délégation à travers les étangs de pisciculture avant de proposer une dégustation d’huîtres locales ouvertes, de surcroît, par deux services civiques béninois présents sur place.

A l’antenne de Chadignac, le visite a été la découverte des serres de l’exploitation de production horticole et maraîchère, organisée par sa directrice Clotilde Plantureux, suivie de la rencontre avec le directeur du lycée, Stéphane Barmoy.

Rodolphe Zegrar, formateur sur les métiers de l’eau au CFA de Desclaude, chef d’orchestre de ces rencontres, a été, par son organisation et sa logistique millimétrée, une des clefs de la réussite de ces journées du 11 au 15 décembre 2023.

Quelles perspectives ?

La coopération internationale, sujet transversal de la semaine, a été à nouveau soulignée lors de la présentation des prochaines collaborations du département Charente Maritime à Djibouti ou en Guinée.

Les Nigérians ont été fortement intéressés par le dispositif de services civiques internationaux et même si aucune agence de France Volontaires n’est présente sur le territoire, le réseau, en collaboration avec Sonia Darracq, Conseillère aux Affaires Agricoles à Abuja, réfléchit à une organisation pour cet accompagnement.

Suite à ces rencontres, dans une perspective de renforcement des capacités des ATVET, la seconde phase sera une mission du BRECI au Nigéria, au printemps 2024, afin d’identifier les actions à conduire. Mais ces échanges ont déjà permis de tisser des liens étroits entre les représentants des établissements agricoles nigérians et français et la réflexion sur des collaborations techniques est d’ores et déjà bien avancée.

 

Contacts : William Gex, animateur du réseau Nigéria, william.gex@educagri.fr, Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI, vanessa.forsans@educagri.fr, Rachid Benlafquih, chargé de coopération Afrique subsaharienne/ECSI/expertise internationale au BRECI, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr, Sonia Darracq, conseillère aux affaires agricoles au Nigéria, sonia.darracq@dgtresor.gouv.fr

Zaïnatou Sore, Head of Capacity Development, CGIAR Consultative Group on International Agricultural Research, S.Sore@cgiar.org




L’expertise française mobilisée en Algérie

Finaliser le référentiel de certificat de formation d’excellence des conseillers spécialisés en production laitière à Sétif (Algérie), tel a été le principal objectif de la mission d’expertise réalisée par Hervé Jacob, ingénieur agronome consultant et Stéphanie Deltheil, enseignante en zootechnie au lycée agricole d’Auch.

Ce projet s’inscrit dans le cadre d’une collaboration de longue date entre la Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche du Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire français et la Direction de la Formation Agricole, de la Recherche et de l’Innovation (DFARI) du ministère de l’agriculture et du développement rural algérien. Le partenariat DGER/DFARI repose sur une coopération débutée en 2003, avec des formations dispensées par la DGER auprès de formateurs des établissements sous la tutelle de la DFARI, mais aussi des échanges entre établissements algériens et français dans l’objectif de jumelages. Depuis 2015, la réalisation d’un programme PROFAS C+ a permis dans une première phase de travailler conjointement à la rénovation des statuts des établissements d’enseignement agricole algériens, à la mise à jour du statut des cadres des directions de ces établissements, à la mise en place d’une cellule nationale d’ingénierie de formation au sein de la DFARI (ayant développé un « pôle lait »). Dans une deuxième phase, les partenaires ont décidé de créer à Sétif un centre de formation d’excellence dans le secteur de la production laitière et ont élaboré un référentiel métier de conseiller agricole en production laitière. La mise en place d’une formation dans ce domaine au sein de l’Institut technologique spécialisé de formation agricole (ITSFA) de Sétif permettra de répondre directement aux besoins de cette filière prioritaire pour l’Algérie. La gouvernance du projet associera d’ailleurs les principales entreprises du secteur.

Le projet consiste à accompagner l’ITSFA de Sétif pour qu’il puisse former des « techniciens de haut niveau » (spécialisation complémentaire d’agronomes ou de vétérinaires) en production laitière, capables de répondre aux besoins exprimés par les responsables professionnels du secteur, tout en intégrant les dimensions du développement durable. Le projet repose sur un diagnostic partagé des besoins en formation. Suite à une série d’appuis, l’ITSFA, avec la contribution de quelques professionnels, a élaboré un référentiel professionnel, une ébauche de référentiel de certification et un référentiel de formation de conseiller spécialisé en production laitière comprenant un document d’accompagnement à sa mise en œuvre. Ce document d’une vingtaine de pages a été analysé par deux experts français, en février 2022.

Hervé Jacob, vous participez à ce projet depuis son commencement, quelle a été la spécificité de cette dernière mission d’expertise ?

C’est un projet auquel je participe effectivement depuis son démarrage fin 2018 avec plusieurs missions à Sétif en 2019, un suivi à distance en 2020 pour cause de COVID et une interruption de plusieurs mois dans un contexte franco-algérien une nouvelle fois « complexe » …
Reprendre ce projet est très motivant car il a, d’emblée, bénéficié d’un vrai soutien des opérateurs de la filière laitière de la région de Sétif (coopératives ou privés) et beaucoup de travail avait déjà été fait.
Avec mon nouveau binôme, Stéphanie, avec laquelle je crois pouvoir dire que l’entente a été très bonne, nous sommes rentrés dans le vif du sujet, à savoir le contenu de la formation de conseiller spécialisé en production laitière, son organisation temporelle, les modalités pédagogiques, etc…
Le groupe de travail côté algérien était très impliqué et nous avons, je crois, beaucoup progressé sur les 4 jours de cette première mission.
Au-delà de la satisfaction d’une mission utile, nous avons pu reprendre ou nouer avec certains membres de l’équipe une vraie relation, ce qui ne va pas toujours de soi, et ces moments-là, à mes yeux, sont très précieux !

Stéphanie Deltheil, qu’est-ce qui vous a amenée à répondre à l’appel à manifestation d’intérêt lancé par le réseau CEFAGRI pour cette mission ?

Enseignante depuis 2013, je souhaitais diversifier et enrichir l’aspect pédagogique de ma fonction. M’investir dans un projet de coopération internationale me permettait aussi de répondre à l’une des 5 missions de l’enseignement agricole.
Ma formation et mon expérience en production laitière, mon intérêt pour l’élevage à l’international, ainsi que mon statut d’enseignante m’ont permis de me positionner sur cet Appel à Manifestation d’Intérêt pour la mise en place d’un centre d’excellence en production laitière à l’ITSFA de Sétif en Algérie.

Comment avez-vous préparé cette mission ?

Nous avons participé avec Hervé à 2 entretiens en visioconférence avec la partie algérienne qui ont principalement permis d’organiser les présentations puisque j‘arrivais en remplacement de Dominique Baudry, coordinateur jusqu’en 2022 pour la DGER du programme PROFAS C+ dans lequel s’inscrit ce projet.
Hervé Jacob et Anne-Laure Roy, chargée de coopération avec le Maghreb au BRECI/DGER en charge de ce dossier, m’ont également fourni un corpus documentaire nécessaire à la compréhension du travail effectué en amont, et au contexte agricole et laitier algérien.
Nous avons ensuite travaillé ensemble à distance avec Hervé pour planifier les journées et les ateliers que nous souhaitions conduire au cours de la mission à venir.

Et sur place, en Algérie, comment s’est déroulée l’expertise ?

Nous avons alterné les périodes de travail en salle et les périodes sur le terrain.
Après un temps d’accueil, la première demi-journée de travail en salle nous a permis de revenir sur les missions précédentes, d’exposer les attentes de chacun, et de planifier les ateliers de la semaine.

Nous avons ensuite bénéficié d’une visite des nouvelles installations de l’ITSFA, qui devrait servir de support aux apprenants de la formation d’excellence.

Nos partenaires algériens nous ont ensuite réservé une journée entière de terrain : visites d’exploitations (familiales et jeunes investisseurs) et de la laiterie EL ANFAL, partie prenante dans ce projet.
Ces moments d’échanges nous ont permis d’appréhender le contexte local de la production laitière, de poursuivre la visite d’installations potentiellement supports pratiques pour les futurs apprenants, ainsi que de nous projeter sur les cas types qui pourront être rencontrés par les apprenants dans les élevages.
Nous avons également pu prendre conscience de l’hétérogénéité des exploitations visitées quant au niveau de formation des éleveurs, à la taille des exploitations, au faible niveau d’autonomie alimentaire, … et des difficultés que pourront rencontrer les futurs stagiaires dans l’exercice de leur métier de conseiller spécialisé en production laitière pour améliorer les pratiques.

   

Les journées suivantes ont été consacrées à des travaux de groupe en salle en vue de peaufiner le référentiel de formation et sa mise en application pratique.

Pouvez-vous nous présenter le livrable que vous avez dû élaborer ?

Dominique Baudry et Hervé Jacob avaient travaillé sur le référentiel de formation. L’objectif de cette nouvelle mission était d’approfondir le référentiel de formation, d’ajuster et d’enrichir le document afin d’en tirer le déroulé précis de la formation et de fixer les modalités pédagogiques et d’évaluation, enfin de répartir les tâches et responsabilités entre les enseignants, les intervenants professionnels, les administratifs et réfléchir ensemble à la logistique. A ce stade de la mission, nous avons donc principalement travaillé sur les modalités pratiques de la mise en place de la formation.

Que retenez-vous particulièrement de cette expérience ? Que vous a-t-elle apporté personnellement et/ou professionnellement ?

Comme évoqué par Hervé, les rencontres humaines ont été au cœur de cette première mission.
En premier lieu, celle avec mon binôme de travail, passionné et connaisseur de ce beau pays via les expériences antérieures personnelles et professionnelles qu’il y a vécues ; il m’a permis d’y faire mes premiers pas en toute confiance, et je l’en remercie. Il a été un guide précieux pour me permettre de prendre progressivement ma place dans cette mission.
Pour ma première visite en Algérie, je suis sincèrement enchantée de cette découverte et des nombreuses rencontres. Je souhaite d’ailleurs remercier sincèrement chacun des membres de la partie algérienne, tous ayant à cœur de mener à bien ce projet et nous ayant réservé un accueil chaleureux.
Cet accueil qui nous a été réservé, et le travail fourni par l’équipe algérienne depuis la mission précédente nous ont permis de nous mettre au travail rapidement et de travailler conjointement et efficacement.
Professionnellement, je souhaite réinvestir cette expérience dans mon enseignement, tant en terme de contenu que de gestion de groupe.
Auprès des élèves, cela me permettra d’approfondir avec eux les connaissances sur l’agriculture et l’élevage à l’international, l’importance des relations entre pays, l’intérêt qu il y a à faire preuve de curiosité envers « l’autre » en général et bien sûr transmettre également un message global d’ouverture.
Sur le plan de la gestion de groupe, cela m’a appris à travailler en équipe avec un certain nombre de contraintes fortes : immersion rapide avec reprise d’un projet déjà engagé, hétérogénéité des profils des intervenants et mixité des cultures, connaissance limitée du contexte, durée de mission courte, journées intenses et un objectif à très court terme de l’ouverture de la formation.

Quelles sont les suites envisagées ?

Une deuxième mission se prépare. Les objectifs sont à nouveau multiples et seront de terminer l’analyse en profondeur des 3 documents constitutifs du référentiel de certificat (référentiels professionnel + de certification + de formation) et de co-animer avec l’ITSFA de Sétif un atelier de présentation de la formation à une vingtaine d’acteurs de la filière (éleveurs traditionnels et modernes, GIPlait, Coopératives laitières, représentants de l’interprofession, universitaires du pôle agricole intégré de Sétif…). Les participants à l’atelier sont de potentiels intervenants dans la formation, de futurs recruteurs ou encadreurs de stage des conseillers. Enfin l’important sera d’ajuster le contenu du référentiel de certificat en fonction des retours de l’atelier.

Un challenge à relever afin que l’ouverture de cette formation d’excellence puisse avoir lieu en 2024 !

Crédit photographique de la photo de tête d’article : Le 360 Afrique

Propos recueillis par Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI, vanessa.forsans@educagri.fr

Contacts : Stéphanie Deltheil, enseignante en zootechnie, experte en productions laitières, stephanie.deltheil@educagri.fr, Hervé Jacob, ingénieur agronome consultant, hervejacob.agro@laposte.net

Gilles Tatin, chef du projet, référent Algérie et coopération internationale en DRAAF-SRFD Centre Val-de-Loire, Délégué Régional Ingénierie de Formation (DRIF), Animateur national du réseau DRIF (DGER), gilles.tatin@agriculture.gouv.fr

Anne-Laure Roy, chargée de coopération Maghreb au BRECI/DGER, anne-laure.roy@agriculture.gouv.fr, Rachid Benlafquih, chargé de mission expertise à l’international au BRECI/DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr




Le Bénin choisit l’expertise française

L’expertise de l’enseignement agricole français accompagne le passage de 10 à 30 lycées techniques agricoles au Bénin : des ateliers de co-construction d’analyses de situations de travail ont eu lieu à Cotonou entre le 17 et le 27 septembre 2023.

Le Bénin, via son Agence de Développement de l’Enseignement Technique (ADET) a entrepris une grande réforme institutionnelle de l’enseignement technique et professionnel, en particulier agricole, passant de 10 à 30 lycées techniques agricoles (LTA).
Sollicité par l’ADET dès 2021, l’enseignement agricole français (via la DGER/BRECI et ses réseaux Afrique de l’Ouest et CEFAGRI) a élaboré avec France Éducation International (FEI) une offre technique pour accompagner cette réforme. Les enjeux sont d’importance : il s’agit d’élaborer des programmes de formation, produire des ressources pédagogiques, identifier les équipements nécessaires aux formations, préparer l’implantation des filières ; soutenir, par la formation et l’insertion les jeunes dans la vie active, les politiques territoriales de développement économique et social ; mettre en place une professionnalisation des métiers de la formation ; favoriser l’implication active dans le territoire, des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement, et structurer une dynamique tournée vers l’innovation et l’expérimentation. 11 filières et 15 diplômes (Diplôme Technicien Métier et Diplôme Technicien Supérieur Métier, DTM et DTSM) sont concernés.
Cet appui est mis en œuvre dans le cadre d’une contribution plus globale en « équipe France » à la réforme de l’appareil de formation professionnelle du Bénin,  s’inscrivant dans le programme de coopération en matière de formation professionnelle entre la République du Bénin et la France signé à la suite du déplacement au Bénin du Président de la République française en juillet 2022. Avec un financement de la Banque mondiale d’un montant de 1,22 M€, ce projet a en ligne de mire l’accueil de 48 000 apprenants afin de les former très concrètement aux métiers de l’agriculture.

Ainsi, une première mission dans le cadre de ce projet a mené au Bénin entre le 17 et le 27 septembre 2023 un groupe d’experts de l’enseignement agricole français, accompagnés par le réseau CEFAGRI et France Education International. Une réunion de cadrage entre l’ADET, FEI et la DGER (BRECI) a permis le lancement officiel du projet. Puis les experts en aquaculture, en élevages de ruminants, de porcins, en productions horticoles, fruitières et forestières, en agroéquipements… ont animé des ateliers de co-construction d’analyses de situations de travail (AST) avec des professionnels béninois, tant de la production que de la formation agricoles (enseignants et directeurs de LTA, inspecteurs). À leurs côtés étaient présents des experts marocains recrutés par FEI ainsi que des spécialistes du coton et du palmier à huile ayant rejoint l’équipe d’experts par le truchement du réseau CEFAGRI.

Les experts de l’enseignement agricole français témoignent de cette expérience de co-construction d’analyses de situations de travail avec des collègues et partenaires béninois avec lesquels la coopération n’est pas nouvelle :

Jean-Roland Arbus, enseignant d’agronomie au LEGTA de Figeac et co-animateur du réseau Afrique de l’Ouest :
Suite à deux missions au Bénin, en 2019 et 2021, en tant que co-animateur du réseau Afrique de l’Ouest, j’ai trouvé logique de contribuer à la co-écriture des référentiels avec les Béninois. Être à l’écoute de leurs attentes pour les intégrer dans les référentiels, travailler en équipe d’experts sont des éléments de réussite. Enfin soulignons l’importance d’intégrer l’agroécologie, la durabilité et la gestion économique dans ces référentiels pour les futurs entrepreneurs béninois.

 

Patrick Desnos, enseignant d’agronomie au lycée horticole privé de Saint-Ilan (Côtes-d’Armor) :
La rencontre avec les professionnels, les enseignants et les inspecteurs béninois nous a permis de mieux appréhender les attentes de nos partenaires et de confronter nos visions « Nord-Sud » des métiers des différentes filières agricoles étudiées. Cette co-construction de l’analyse des situations de travail dans le domaine du maraîchage, de l’horticulture ornementale, de l’arboriculture fruitière et forestière m’a permis de mieux cerner ces différents métiers au Bénin. Les diplômes visés de technicien métier et de technicien supérieur métier ont pour but, entre autres, de favoriser la création d’entreprise permettant à des jeunes béninois de participer à la souveraineté alimentaire de leur pays et d’améliorer la chaîne de valeurs. Les échanges avec l’ensemble des participants ont été riches et constructifs : une co-construction à poursuivre pour écrire le référentiel de compétences dans le cadre de cette rénovation ambitieuse.

Catherine Lejolivet, enseignante d’aquaculture au LEGTA de La Canourgue (EPL de la Lozère) :
Bénin comme Bienveillance : c’est le sentiment fort ressenti pendant cette semaine de travaux collaboratifs avec les partenaires des filières professionnelles agricoles, l’inspection et les enseignants des lycées techniques. Ce fut une première en Afrique de l’Ouest, me concernant. La mission de co-construction de programmes de formation aquacole est d’importance pour ce pays désireux de former des techniciens et des techniciens supérieurs leur permettant de s’installer, de piloter ainsi leurs entreprises avec un maximum de clés et de contribuer à l’approvisionnement des marchés demandeurs de produits aquatiques d’eau douce ou saumâtre. D’où le challenge pour moi : comprendre le contexte aquacole, les attentes des partenaires afin de répondre au mieux dans un esprit clairement de convivialité partagée. Les échanges ont été riches, vivants et constructifs, hâte de poursuivre l’aventure franco-béninoise !

 

Arnaud Lefèvre, directeur de l’exploitation ostréicole de l’EPL de Bourcefranc :
Suite à des échanges réguliers avec différents partenaires béninois depuis plus de vingt ans, il m’a semblé intéressant de participer à l’évolution des curricula des formations techniques en aquaculture. Au sein de ce secteur très dynamique en Afrique de l’Ouest depuis quelques années, le Bénin réussit à tirer son épingle du jeu, grâce en particulier à la mise en place de l’organisation de la filière. Les échanges avec les professionnels, mais également avec les enseignants et les représentants de l’administration, permettent de contextualiser et de partager les différentes opinions sur ce secteur de production. L’enjeu premier est de proposer des programmes basés sur les pratiques, de façon à ce que les apprenants soient opérationnels dès la sortie des études. Au-delà, la demande inclut de considérer dans ces formations les évolutions et les innovations envisageables de la filière aquacole au Bénin.

Jean-Louis Devoyon, enseignant d’agroéquipement au LPA de Saint-Yrieix-la-Perche :

Sollicité par le BRECI/DGER et avec l’aide de Guillaume Gillet de l’ENSFEA, le lycée agricole de Saint-Yrieix-la-Perche est un établissement reconnu dans le domaine des agroéquipements avec une dimension internationale puisqu’il coopère avec des pays d’Afrique et en particulier le Bénin. C’est à ce titre que j’ai été mobilisé sur ce projet pour la co-construction selon l’approche par compétences (APC) des référentiels de formation en machinisme (DTM/DTSM). J’ai ainsi pu valoriser et partager mon expérience en mécanisation agricole afin de proposer des formations qui répondent aux mieux à la demande professionnelle actuelle et à venir pour une insertion réussie des futurs apprenants. En tant qu’expert, j’ai pu prendre la mesure des forts enjeux de ce projet ambitieux par rapport aux grandes potentialités de ce pays en développement et ce fut un honneur pour moi de pouvoir modestement y contribuer. De cette première expérience, je retiendrai la difficulté de proposer une offre de formation cohérente non seulement au regard de la structuration des branches sectorielles actuelles mais aussi tenant compte du secteur informel, non-formel le plus représentatif. Il est apparu ainsi important d’ouvrir cette formation à des métiers pas seulement tournés vers la maintenance agricole mais aussi vers l’utilisation, la conduite, le réglage des machines voire dans certains cas l’adaptation-conception simples d’outils. C’est précisément ce lien agronomique avec le vivant qui permettra à court terme un renforcement capacitaire de l’arrière paysage rural et de son développement économique par un ancrage de jeunes dans leur territoire. Dans cette perspective, la réduction de la pénibilité des travaux agricoles grâce au développement d’une mécanisation raisonnée doit en principe permettre une meilleure productivité des sols et attractivité du métier chez les jeunes agriculteurs, leur offrant ainsi des conditions de vie meilleures et  participant alors dans une certaine mesure à la déconstruction des imaginaires migratoires.

Xavier Baudouin, directeur de l’exploitation agricole de l’EPL de Vire :
Les missions d’expertise constituent un levier essentiel de la coopération internationale, ainsi qu’un outil de dialogue et de valorisation des savoirs faire. Notre mission sur le sol béninois fut une expérience véritablement enrichissante. La rencontre avec les acteurs locaux, qu’ils soient professionnels du secteur, enseignants ou inspecteurs, a grandement contribué à notre compréhension des attentes de nos homologues béninois.
De plus, elle a permis de confronter nos perspectives distinctes sur les métiers agricoles, en intégrant les visions tant « Nord » que « Sud ». Cette convergence d’idées s’est avérée être le socle essentiel à la poursuite de notre collaboration dans le cadre de la révision ambitieuse du référentiel de compétences. De nos discussions, est née une belle opportunité : celle de co-créer, co-construire, d’unir nos forces pour tracer le chemin d’une rénovation ambitieuse.
Ce premier pas ne représente qu’une étape préliminaire. Il incarne une promesse de synergies futures, où nos compétences et notre engagement mutuel se fondent dans la rédaction d’un référentiel. Notre récit, forgé par notre passion pour l’agriculture et notre désir de contribuer au progrès, se prolongera, établissant un lien solide et durable entre deux nations unies par leur quête d’excellence dans le domaine agricole.

À l’issue de cette première mission, toutes les analyses de situation de travail co-construites au cours des ateliers puis rédigées par les experts français et marocains sont relues par une DRIF (déléguée régionale à l’ingénierie de formation) de l’enseignement agricole afin d’en proposer à l’ADET une version finale tout à fait complète et harmonisée.

L’ensemble des experts français et marocains ainsi que leurs homologues béninois se retrouveront au Bénin en décembre 2023 pour la prochaine étape : l’élaboration conjointe des référentiels de compétences. Viendront ensuite, avant la fin de cette année scolaire, les missions de co-construction des référentiels de formation et d’évaluation. Ces missions seront bien évidemment accompagnées par les coordonnateurs du projet,  béninois (l’ADET) et français (le MENJS via FEI et le MASA via la DGER/BRECI et son réseau CEFAGRI) qui veilleront à assurer la bonne conduite de cette importante coopération multi-acteurs.

Contacts : Vanessa FORSANS, animatrice du réseau CEFAGRI, co-animatrice du réseau Afrique de l’Ouest
vanessa.forsans@educagri.fr, Rachid BENLAFQUIH, chargé de coopération Afrique subsaharienne / Éducation à la citoyenneté et à la solidarité internationale / Expertise internationale au BRECI/DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr