PAFAR : vers une nouvelle génération agricole

Une première mission sous forme d’ateliers participatifs a été menée fin mai 2024 en Angola par trois expertes de l’enseignement agricole français, dans le cadre du PAFAR – Projet d’appui à la formation agricole et rurale.

Suite à la visite du Président de la République d’Angola en France en 2018, des accords de coopération intergouvernementaux ont été signés dans le domaine de l’agriculture.
La déclaration conjointe des ministres angolais et français de l’agriculture du 02 avril 2019 indique qu’un des objectifs est de « développer la coopération en matière de formation professionnelle agricole, notamment au niveau secondaire, pour renforcer la capacité des cadres et promouvoir l’employabilité des jeunes dans les activités agricoles ». Cette coopération se concentrera sur les 12 écoles secondaires agricoles angolaises, appelés Instituts techniques agraires (ITA).

Qu’est-ce que le PAFAR ?

Dans ce contexte, l’Agence française de développement (AFD) a commandé en 2019 une étude de faisabilité pour un projet de redynamisation de la formation technique dans le secteur agricole (l’étude de pré-faisabilité coordonnée par la DGER ayant été menée par l’Institut Agro, le réseau FAR et l’ENSFEA). L’étude de faisabilité a permis de formuler le projet d’appui à la formation agricole et rurale (PAFAR), et l’AFD a accordé à l’État angolais un financement de 35 millions d’euros pour le mettre en œuvre, auxquels s’ajoutent 5 millions d’euros de l’Union européenne. La convention de financement de ce projet a été signée par l’AFD et le gouvernement angolais le 12 mai 2022.

Le PAFAR vise à revitaliser le système de formation agricole au niveau de l’enseignement secondaire. Pour ce faire, le projet décline 3 sous-objectifs : assurer une meilleure adéquation entre les programmes de formation technique et professionnelle et les compétences requises par le secteur agricole, en tenant compte des besoins spécifiques de formation et d’orientation des femmes et des hommes ; renforcer l’intégration des ITA sur leur territoire et améliorer la gouvernance du système de formation agricole et rurale, dans une perspective de genre ; doter les ITA d’infrastructures, adaptées aux besoins spécifiques des femmes et des hommes, leur permettant d’enseigner dans de bonnes conditions, et assurer la pérennité du patrimoine des ITA.

Dans ce contexte, le Ministère de l’éducation de la République d’Angola a lancé le 03 janvier 2023 un appel d’offres international pour sélectionner un bureau d’études en vue de la fourniture d’assistance technique à la maîtrise d’ouvrage du PAFAR.
Une réponse française a été proposée par le bureau d’études SFERE, en consortium avec l’Institut Agro, IRAM, Egis-Forhom, et la participation de la DGER. Cette offre, retenue par la partie angolaise, permet en particulier d’assurer la coordination entre les différentes parties prenantes concernées et de sécuriser la dimension institutionnelle de ce projet qui se situe au sein d’une coopération d’enjeu politique entre les gouvernements français et angolais. Il s’agit également de mobiliser de façon cohérente et concertée, via le réseau CEFAGRI, l’expertise de l’enseignement agricole émanant des établissements sous tutelle du MASAF/DGER et clairement attendue dans ce projet.

Premières phases opérationnelles

Après l’arrivée en Angola au sein de l’équipe PAFAR d’une assistante technique résidente en novembre 2023 et une mission du BRECI en janvier 2024, les premières missions d’expertise court-terme ont pu être programmées.
Ainsi, la première a été menée durant la seconde quinzaine de mai 2024 par 3 expertes : Marie-Catherine Arbellot-de-Vacqueur, cheffe du SRFD de Bourgogne-Franche Comté, Sandrine Belvèze, en charge de la politique régionale de l’apprentissage à la DRAAF d’Occitanie, et Fanny Payet, directrice du CFA-CFPPA Forma’terra à La Réunion.
L’ensemble de cette mission a été suivi par Thibaut Nancy, agent de la DGER mis à disposition auprès du ministère de l’enseignement supérieur d’Angola : qu’il soit ici chaleureusement remercié pour la qualité de son accompagnement.

 

Marie-Catherine Arbellot-de-Vacqueur, quels étaient les objectifs de cette mission d’expertise ? Comment s’est-elle déroulée ?

Les objectifs de cette mission d’expertise visaient à présenter les spécificités de l’enseignement agricole technique en France, avec quelques focales particulières à la demande des partenaires angolais : le fonctionnement des Établissements de l’enseignement technique agricole, le rôle des exploitations agricoles dans la formation des apprenants, la question des compétences professionnelles dans la construction des référentiels de formation.
Ils ont été les fils conducteurs d’une mission de terrain qui s’est déroulée sur une quinzaine de jours au cours de laquelle une présentation de l’enseignement agricole français a été proposée à Luanda à un public d’institutionnels engagés dans le PAFAR.
S’en sont suivis trois ateliers de terrain à Malanje, Tchivinguiro et Lubango qui ont permis d’une part de partager ces mêmes informations auprès de chefs d’établissement, de formateurs et de partenaires institutionnels et professionnels des ITA, mais aussi et surtout de mettre les équipes en réflexion sur des évolutions possibles de l’organisation de l’enseignement agricole technique en Angola pour répondre aux enjeux du pays, à commencer par celui de la sécurité alimentaire, le rôle de l’agriculture dans le développement économique local, sans oublier l’adaptation au changement climatique ou encore la réflexion sur l’attractivité des métiers agricoles.
Ces déplacements de terrain ont également permis de mieux cerner les réalités locales, les attentes des partenaires, et d’adapter la contribution de l’enseignement agricole français aux travaux en cours dans le cadre du PAFAR. Je retiens entre autre le sujet des exploitations agricoles des ITA, mais aussi d’autres thématiques telles que la formation des enseignants, la création de ressources pédagogiques de qualité et contextualisées.

Sandrine Belvèze, comment avez-vous préparé cette mission ? Quels en sont les résultats ?

Comme pour toute mission à l’international il convient de se préparer en amont tant au niveau de la connaissance des attendus des commanditaires, des besoins des parties prenantes que du recueil de toutes informations pouvant faciliter la compréhension de la mission.
S’appuyer sur les compétences au sein du BRECI, du réseau CEFAGRI ainsi que sur des personnes ayant déjà réalisé des missions en Angola a permis au groupe d’expertise de valoriser des données existantes et de mieux comprendre les enjeux du pays, de l’agriculture et de la formation agricole.
Cette mission a été riche en rencontres, en constats, dont le premier est la volonté de la chaîne décisionnaire d’organiser un modèle de formation agricole en lien avec les territoires angolais, leurs diversités, les potentiels de développement face à une agriculture dont les enjeux sont très importants.
Ils sont en certains points communs aux nôtres (renouvellement générationnel, souveraineté alimentaire, adaptation aux changements climatiques…) mais s’inscrivent dans une histoire tragique où de nombreux leviers doivent être activés pour reconstruire le système de formation.
Cette mission a été porteuse d’espoirs face à des acteurs du PAFAR et des enseignants motivés et prêts à s’approprier et déployer un nouveau modèle en s’inspirant de celui déployé en France, et ce au bénéfice de la jeunesse angolaise.
C’est en cela que le résultat de cette première mission me semble positif et augure une poursuite favorable aux relations entre les acteurs de l’enseignement agricole de nos deux pays.

Fanny Payet, que retenez-vous de cette mission d’expertise ?

C’est un projet très enthousiasmant où la motivation et l’implication des collègues angolais est à la hauteur des enjeux auxquels le pays doit faire face. Je retiens la qualité des échanges avec les différents acteurs rencontrés et la confiance qu’ils nous ont accordée, l’intérêt manifesté pour l’enseignement agricole français ainsi que pour les transpositions et adaptations locales qui pourront en être faites. J’ai découvert un pays singulier, très attachant, marqué par des années de guerre et qui se relève malgré tout.

Prochaines étapes

Une deuxième mission d’expertise en Angola auprès de l’équipe du PAFAR  est prévue pour novembre 2024. Il s’agira de poursuivre le travail sur un curriculum de technicien agricole polyvalent. Ensuite, une délégation angolaise composée de membres de l’équipe du PAFAR et de directeurs d’ITA sera accueillie en France  pour une visite d’étude. Accompagnée par le BRECI, cette délégation se rendra en Bourgogne-Franche Comté où elle pourra appréhender in situ le fonctionnement des établissements agricoles, en particulier de leurs exploitations, leur ancrage territorial, leur système de gouvernance… comme autant de sources d’inspiration pour une adaptation au contexte angolais.

 

Contact :
Rachid Benlafquih, chargé de coopération Afrique subsaharienne/ECSI/expertise à l’international au BRECI/DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr, Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI, vanessa.forsans@educagri.fr




Deux proviseurs au Kazakhstan…

Deux directeurs d’établissements agricoles français participent au projet Agrisen, dont l’objectif final est de structurer une plateforme de formation associée à un modèle de business pérenne qui permettra de répondre aux besoins de renforcement du capital humain de l’agriculture au Kazakhstan.

Le projet Agrisen est une initiative réunissant des universités et établissements d’enseignement secondaire et supérieur ainsi que des entreprises privées kazakhstanaises, l’Ambassade de France au Kazakhstan et le Ministère français de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA-Direction générale de l’enseignement agricole et de la recherche) via son réseau CEFAGRI.
L’initiative se focalise sur l’apprentissage des savoir et savoir-faire fondamentaux identifiés comme lacunaires et essentiels pour le développement de l’agriculture kazakhstanaise, à savoir les agritechnologies, le machinisme agricole, les langues (anglais et français), les soft-skills (ouverture au monde, gestion des conflits). Par ailleurs, l’initiative aura également pour effet secondaire de renforcer l’attractivité des métiers du vivant au Kazakhstan en démontrant leur caractère innovant, technique et permettant à leurs acteurs d’évoluer dans leur carrière.

Le projet se développe à la fois à distance et en présentiel, par des réunions en visioconférence ou à l’occasion du Salon international de l’agriculture à Paris par exemple, mais aussi avec des webinaires réunissant les différents acteurs, et lors d’une première mission en avril 2024, co-financée par le MASA.
Pierre Virmont, directeur de l’EPL de Saint-Gaudens, et François Piperaux, directeur du CFPPA de Toulouse Auzeville, participent à différentes étapes de ce projet en tant qu’experts de l’enseignement agricole.

Des webinaires pour amorcer la coopération

Un premier webinaire s’est tenu le 27 février 2024, avec les acteurs locaux afin de faire émerger une vision commune des enjeux d’attractivité des métiers de l’agriculture. L’expérience française de “L’Aventure du Vivant” a pu nourrir les échanges.

Un second webinaire, le 4 avril 2024, a permis de travailler sur le sujet de la relation entre les établissements de formation et les acteurs privés concernant les questions d’éducation, les pédagogies mises en oeuvre. À l’issue de ce webinaire, la co-construction de curricula de formation avec les entreprises et l’expérimentation et la diffusion du modèle de l’apprentissage ont été relevées comme fondamentales.

Une première mission au Kazakhstan

Après quelques visites de terrain, un atelier de lancement du projet Agrisen a eu lieu à Astana, à Kazakh AgroTechnical University named after S.Seifullin, le 23 avril 2024. L’événement, ouvert par le recteur de l’Université, a réuni, aux côtés des deux experts du réseau CEFAGRI, la Conseillère aux affaires agricoles Marie-Agnès Amos, le CEO de Valeur-Tech Pierre Poullain, les représentants de la holding agricole AITAS Ruslan Zhemkov et Aliya Svanova, ainsi que les représentants d’entreprises kazahstanaises du secteur agricole, des enseignants et des étudiants de l’université.

Les participants ont activement discuté des besoins des entreprises et des problèmes du secteur agricole du Kazakhstan. Les experts français ont présenté le système d’enseignement agricole français, qui intègre à la fois une formation théorique et le développement de compétences pratiques.
Ils ont mis en oeuvre un travail stratégique, co-construit avec les acteurs locaux (entreprises, universités, agro-collèges, étudiants). La définition de curricula de type Brevet professionnel Responsable d’entreprise agricole (BPREA) a été retenue comme axe prioritaire pour le projet afin de structurer les programmes de formation des agri-collèges, mais également les formations professionnelles courtes dans une logique modulaire. Par ailleurs, il a été recommandé de travailler à un modèle de business pérenne sur une logique d’Opérateur de Compétences.

Un projet qui s’étoffe

Dans ce cadre, une mission d’études est prévue pour fin octobre 2024 afin d’échanger avec les opérateurs français sur ces questions.
Le travail de définition des curricula est quant à lui amorcé avec la contribution active en distanciel de l’équipe pédagogique de l’EPL de Saint-Gaudens et de l’université Kazatu, avec l’identification des situations professionnelles significatives, en lien avec les productions animales et végétales ainsi qu’avec la gestion et les infrastructures de l’exploitation/entreprise agricole. Il devrait aboutir, sur la base du BPREA, à la définition de curricula de formation niveau “chef de cultures”, adaptés au contexte kazakhstanais et support de formation initiale (agro-collèges) et professionnelle.

Pierre Poullain, point de contact entre Agrisen et le MASA pour ce projet, en présente la genèse ainsi que les partenaires techniques et financiers.

« L’initiative Agrisen est née du constat des entreprises du secteur agricole Kazakh de l’écart entre les besoins de capital humain nécessaires pour garantir la mise en oeuvre des nouvelles technologies, la transition des pratiques agricoles avec le déficit de compétences modernes des étudiants et des personnels en poste. L’entreprise AITAS, leader de la volaille de chair dans le pays, a impulsé ce projet dans une logique collaborative en associant d’autres partenaires fondateurs : Universités, Collèges Agricoles et Entreprises. La France a constitué le partenaire institutionnel naturel de l’initiative, particulièrement pertinent au regard de ses compétences spécifiques (productions céréalières, élevage, nouvelles technologies, durabilité), son positionnement mais également de la spécificité et la qualité de son enseignement agricole. »

Parmi les prochaines étapes, est aussi prévue au Kazakhstan une mission de formation menée par un expert de l’enseignement agricole français sur les outils d’intelligence artificielle en agriculture.

L’ambassade de France au Kazakhstan, via son service économique et la Conseillère aux affaires agricoles, exprime son soutien à cette initiative, qui deviendra sans aucun doute un exemple de coopération franco-kazakhstanaise réussie dans le domaine de l’agriculture, l’un des domaines prioritaires pour les deux pays.

Crédit Photographique photo de tête d’article : Paysage de steppes – site du Guide du Routard

Contacts : Rachid Benlafquih, chargé de coopération Afrique subsaharienne/ECSI/expertise à l’international au BRECI/DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr, Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI, vanessa.forsans@educagri.fr, Évelyne Bohuon, animatrice du réseau Arménie Kazakhstan, evelyne.bohuon@educagri.fr

 




CEFAGRI, un réseau d’experts qui grandit

Rencontres du réseau CEFAGRI : favoriser le partage d’expériences, de pratiques professionnelles et d’opportunités en matière d’expertise à l’international, renforcer la vie du réseau et le vivier d’experts qui le constitue, tels étaient les objectifs de l’édition 2024.

Du 15 au 17 mai 2024, au lycée agricole de La Bretonnière en Seine-et-Marne et en distanciel, les participants, agents de l’enseignement agricole aux fonctions diverses et membres d’organismes spécialisés dans l’expertise à l’international, ont été invités à cerner la place et le fonctionnement de l’expertise dans la mission de coopération européenne et internationale de l’enseignement agricole et dans le paysage global des institutions œuvrant à l’international.

Rôle, fonctionnement et activités du réseau CEFAGRI

Piloté par le Bureau des relations européennes et de la coopération internationale (BRECI), le réseau CEFAGRI (Conseil expertise formation agricole à l’international) a été mis en place par la DGER pour appuyer l’identification et la mobilisation de l’expertise de l’enseignement technique agricole afin de la valoriser dans le cadre d’actions de coopération européenne et internationale. Il s’agit pour son animatrice de conduire l’analyse de l’expertise à l’international menée par les établissements de l’enseignement technique agricole et en accompagner la structuration, de rendre visible, lisible et mobilisable le vivier d’experts, d’être à l’interface d’offres et de demandes d’expertise, de valoriser, capitaliser et développer le vivier d’experts et le réseau, d’accompagner la montée en compétences des experts par l’organisation de rencontres, partages d’expériences, formations.
Tous les domaines de l’enseignement technique agricole sont concernés et le profil des experts est donc tout aussi varié : enseignant, formateur, directeur d’établissement, d’exploitation agricole, d’atelier technologique, conseiller principal d’éducation, secrétaire général, technicien de laboratoire, délégué régional à l’ingénierie de formation, inspecteur de l’enseignement agricole, chef de service (régional) de la formation et du développement…
De même, les zones géographiques sont diverses, comme en témoignent les sollicitations reçues et les missions d’expertises réalisées en 2023-2024 par les membres du réseau :

Lorsque la DGER est sollicitée ou identifie une opportunité de mobilisation de l’expertise de l’enseignement agricole, le BRECI via le réseau CEFAGRI diffuse un appel à manifestation d’intérêt (AMI). Sont destinataires de cet AMI les membres du vivier d’experts, les animateurs des réseaux géographiques et thématiques de la DGER, les chargés de coopération européenne et internationale en DRAAF/SRFD et le réseau des DRIF, en vue d’une diffusion dans leurs réseaux respectifs. L’AMI est également visible sur les espaces nationaux Resana CoopEurope&international, Resana CEFAGRI, et le Resana du réseau de la zone géographique concernée. Chaque agent qui souhaite formaliser une candidature au titre de l’AMI diffusé doit partager son intention avec l’autorité hiérarchique dont il dépend. L’animatrice du réseau collecte les candidatures et réalise, en dialogue avec le BRECI, une première sélection. La sélection est ensuite proposée à l’organisation à l’initiative de la sollicitation, qui fait son choix définitif à l’issue de la conduite d’entretiens avec les candidats. À ce stade, le candidat retenu doit solliciter la validation formelle de sa mobilisation auprès de l’autorité hiérarchique dont il dépend. C’est cette dernière qui délivrera l’ordre de mission afférent. L’organisation qui sollicite l’expertise doit préciser les modalités administratives et financières de la mobilisation.

Ateliers et tables rondes

Outre les informations présentées, ce sont des éléments de formation qui ont été proposés aux participants, selon les différentes étapes d’une expertise à l’international de l’enseignement agricole.
Ainsi, la façon d’appréhender des termes de références (TDR) de missions a été abordée à travers des exemples précis présentés par les représentants de FranceAgriMer et d’Expertise France.

De même, un travail a été mené sur la manière de présenter un CV en vue de répondre à un appel à manifestation d’intérêt pour une expertise à l’international.
Il a également été question de la préparation, la réalisation et la finalisation d’une mission d’expertise à l’international, tenant compte des aspects techniques mais aussi administratifs et logistiques très concrets. Et quelques clés indispensables pour travailler en contexte interculturel ont été données aux participants.
Ces derniers points ont notamment fait écho aux expériences partagées par les experts présents et en visioconférence lors de la table ronde « Être expert de l’enseignement agricole à l’international ».

Ont alors été entendus des témoignages de missions et d’acteurs variés, de l’écriture de référentiels pour la réforme des lycées techniques agricoles du Bénin par une enseignante en aquaculture et un directeur d’exploitation agricole, à un workshop en Afrique du Sud par une DRIF (déléguée régionale à l’ingénierie de formation), en passant par le partage de ressources pédagogiques en Côte d’Ivoire autour du dispositif EPA2 (Enseigner à produire autrement pour les transitions et l’agroécologie) par un ancien directeur d’établissement actuellement chef de SFD, la participation à un jumelage européen en lien avec la politique agricole commune, sur les OCM (Organisations communes de marchés) au Monténégro, par un jeune retraité de l’enseignement agricole, ou encore la présentation de l’enseignement agricole français au Kazakhstan par un directeur de CFPPA.

La deuxième table ronde, intitulée « Mobiliser l’expertise de l’enseignement agricole », a réuni en format hybride des représentants de FranceAgriMer, d’Expertise France, de France Éducation International (FEI), d’IRAM, du service DEFIS de l’Institut Agro, ainsi que la conseillère aux affaires agricoles au Nigeria, les mis à disposition de la DGER en Afrique du Sud, Angola et Sénégal. Les différents intervenants ont évoqué l’implication du réseau CEFAGRI dans les projets dont ils sont porteurs.

Ils ont également exprimé leurs attentes et fait part des conditions de mobilisation des experts ainsi que de l’accompagnement de ces derniers dans la préparation et la réalisation des missions par le réseau CEFAGRI/BRECI.

Formalisation d’un groupe de concertation

Enfin, tous ces participants, rejoints par des représentants du bureau d’études SFERE et de France Vétérinaire International (ENSV-FVI), ont travaillé à la formalisation du fonctionnement du groupe de concertation de l’expertise à l’international de l’enseignement agricole.

Un world café a permis de réfléchir collectivement aux objectifs de ce groupe de concertation, à son mode opératoire, et aux relations entre ses membres.
Il en ressort que le groupe de concertation de l’expertise de l’enseignement agricole en Europe et à l’international doit être un espace ouvert de dialogue, de partage d’expériences, de coordination et d’innovation, mis en place sous l’impulsion de la Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche (DGER) afin de favoriser les mises en synergies possibles entre acteurs français de la coopération européenne et internationale dans le domaine de la Formation Agricole et Rurale (FAR). Il réunit des représentants du MEAE, du MENJ, du MASA et de ses établissements, ainsi que les opérateurs du MASA en charge de la mobilisation de l’expertise institutionnelle publique et des bureaux d’études associatifs et privés. Il a en particulier pour vocation de rendre lisible, visible et mobilisable l’expertise publique de l’enseignement agricole dans des projets de coopération institutionnelle multi-acteurs (publics et privés).
Une charte a été proposée, ayant pour objet de dresser les contours du fonctionnement de ce groupe de concertation de l’expertise de l’enseignement agricole, en particulier celle de l’enseignement technique agricole via le réseau CEFAGRI de la DGER, en lien avec les opérateurs des institutions cités plus haut.

Contacts : Rachid Benlafquih, chargé de coopération Afrique subsaharienne/ECSI/expertise à l’international au BRECI/DGER : rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr, Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI : vanessa.forsans@educagri.fr




Innover en formation agricole en Arménie

Margarit Poghosyan, directrice adjointe du développement et des innovations du secteur agricole au Collège régional du Tavouch Patrick Devedjian (Arménie), était en formation en France du 17 février au 2 mars 2024, notamment auprès de Catherine Demesy, directrice de l’EPL Naturapolis à Châteauroux.

Le temps de formation a été organisé dans le cadre d’un partenariat mené par Max Delpérié, ancien directeur d’établissement agricole public, chargé de mission pour le Fonds arménien de France.

Catherine Demesy, comment avez-vous préparé ce temps d’échange et de formation avec votre collègue arménienne ?

Sollicitée par Max Delpérié pour accueillir Margarit Poghosyan, j’ai accepté avec plaisir. Nous avions déjà partagé du temps lors de sa première mission en 2023 lorsque j’étais directrice adjointe au lycée agricole Les Vaseix, à Limoges, sur le pilotage pédagogique et ce temps partagé avait été très riche d’échanges.
Cette fois-ci nous avons élaboré un programme complémentaire sur 4 thématiques : pilotage financier, ressources humaines, projet d’établissement et coopération internationale. Pendant quatre jours, Margarit m’a suivie dans mon quotidien et a participé à mes différentes réunions pour étudier mon mode de management. Nous avons pris une demi-journée pour visiter l’établissement et aller à la rencontre des équipes et des jeunes, une demi-journée pour échanger autour du suivi financier de l’établissement, une demi-journée sur les ressources humaines. Et nous avons organisé une réunion avec l’équipe coopération internationale de Naturapolis pour étudier ensemble les différentes possibilités de partenariats entre nos deux établissements. Nous avons également échangé autour de la feuille de route stratégique de l’établissement que nous avons rédigée avant de mettre en place l’évaluation de l’établissement. Au-delà de la présentation de nos pratiques, nous avons essayé de voir ce qui était transposable et ce qui ne l’était pas et avons abordé l’axe de la formation, nécessaire pour faire évoluer les pratiques de nos collaborateurs.

Catherine Demesy et Margarit Poghosyan.

Qu’est-ce qui vous a intéressée dans cette démarche ?

Ces quatre journées ont été très riches d’échanges, j’ai pris autant de plaisir à transmettre mes pratiques qu’à profiter du regard extérieur précieux et pertinent de Margarit.
Au-delà des liens d’amitié qui se sont tissés lors de ces deux missions de Margarit Poghosyan en France, pouvoir échanger sur mes pratiques et stratégies, sur mon ressenti et mes questionnements est une vraie richesse pour une nouvelle directrice d’établissement. Cela permet de prendre du recul sur son quotidien et de bénéficier de conseils bienveillants. J’espère que Margarit a pu s’enrichir autant que moi de nos échanges !

Margarit Poghosyan, vous avez passé quelques jours auprès de la directrice de l’EPLEFPA Naturapolis de Châteauroux : quelles sont les raisons de ce choix ? Quels étaient les objectifs de ce temps de formation ? Qu’en retenez-vous ?

Je connais Catherine Demesy, la directrice de l’EPLEFPA Naturapolis de Châteauroux, depuis le mois de janvier 2023 quand j’ai fait ma première formation professionnelle sur le management pédagogique au Lycée agricole de Limoges Les Vaseix où elle était directrice adjointe. Catherine Demesy a repris un nouveau poste de directrice du Lycée Naturapolis depuis la rentrée 2023-2024. Les raisons de ce choix étaient liées à son nouveau poste et à l’expérience de janvier 2023, initiée et organisée par Max Delpérié.

Visite de l’EPL Naturapolis à Châteauroux.

Les objectifs de ce deuxième temps de formation étaient multiples, il s’agissait en particulier d’avoir le regard d’une nouvelle directrice d’EPLEFPA suite à sa nomination par rapport au diagnostic de l’établissement, à son plan d’action, à l’évolution du projet d’établissement et à la mise en œuvre de projets pédagogiques, ainsi qu’au management des ressources humaines et financier.
En janvier 2023, lors de mon premier stage au lycée agricole des Vaseix, j’étais impressionnée par le nombre de réunions, de discussions et d’échanges entre les responsables pédagogiques (directrice adjointe, CPE et professeurs principaux), par la participation des élèves aux différents conseils (de classe et d’administration) ainsi que par l’événementiel au sein de l’établissement. Par la suite, à mon retour, j’ai initié des conseils et des réunions pédagogiques plus réguliers avec les acteurs concernés : équipes administrative et pédagogique, réunions de classe et de parents. Le chargé de mission, Max Delpérié, a suggéré un agenda de semaines thématiques (de rentrée, de santé, de francophonie) que nous sommes en train de faire en les adaptant toujours au terrain. Nous avons démarré le travail du Conseil de perfectionnement dont le but est de synchroniser les actions des responsables du recrutement, de l’orientation professionnelle, de la communication et de l’administration appuyées par la présence des experts français. Effectivement, l’une des actions les plus importantes c’est la mise en place et le développement de la qualité des travaux pratiques sur l’exploitation agricole que nous continuons à élaborer. Nous avons pu positionner notre Lycée comme centre francophone de la région du Tavouch et créer des relations plus étroites avec les exploitants, les entités locales (Préfecture, Mairie) et les services de l’Ambassade de France en Arménie.

Un objectif complémentaire concerne la coopération internationale dont la possibilité d’échanges professionnels… Compte tenu des différences énormes entre les modèles de l’enseignement, de l’éducation, des financements et autres, le plus essentiel pour moi était de comprendre les fonctionnements et d’essayer de les adapter aux réalités existantes de mon pays. Par ailleurs, c’était une opportunité de mettre en place les premiers échanges entre nos deux établissements au niveau de la coopération internationale.

Vous avez ensuite participé au Salon international de l’agriculture à Paris : quels sont les interlocuteurs que vous avez eu l’opportunité de rencontrer ? Quelles avancées dans vos projets ces échanges ont-ils permis ?

Au SIA 2024.

L’Aventure du vivant au SIA 2024.

Le choix de la période de ma formation était lié aussi à la 60ème édition du Salon international de l’agriculture de Paris.

Les objectifs premiers étaient de participer au Salon et en voir l’organisation : conférences, échanges, ateliers, partage de savoir-faire, mais aussi d’observer les concours et la présentation des animaux, des produits et des lycées agricoles.
J’ai pu découvrir la communication du Ministère de l’agriculture en direction des jeunes (découverte des métiers et des formations) par la visite du véhicule qui parcourt toutes les régions de France avec le slogan l’Aventure du Vivant.
Enfin, j’ai pu communiquer auprès de représentants de lycées au niveau de partenariats éventuels en coopération internationale.

L’autre point important était la réunion avec des collègues chargés de la coopération internationale à la DGER. La réunion du 27 février, avec Rachid Benlafquih, Vanessa Forsans, Évelyne Bohuon (animatrice du réseau Arménie), a permis de formaliser les échanges préalablement préparés avec Max Delpérié.

Nous avons défini les étapes suivantes de nos actions, en précisant les projets en cours et à venir, en définissant les objectifs de moyen et court termes, l’appel à manifestation d’intérêt pour de l’expertise complémentaire, et le travail à mener en direction de l’Agence Française de Développement et de l’Ambassade de France.

Personnellement, le plus impressionnant a été d’observer et de mesurer la motivation des jeunes et leur amour du métier d’agriculteur et des métiers connexes. Les élèves que j’ai rencontrés avec leurs enseignants ont été très intéressants et très expressifs sur leur engagement. Je retire et retiens beaucoup de points positifs afin d’en inspirer le système que nous mettons en place en Arménie.

Max Delpérié, quel est le contexte de cette coopération ?

En 2020, j’ai été approché par des responsables du Fonds Arménien de France souhaitant rencontrer des lycées agricoles. Les visites des deux lycées dont j’avais la responsabilité en Limousin ont eu lieu avec pour thème principal la présentation des actions pédagogiques induites par l’utilisation des exploitations agricoles et des ateliers technologiques des EPLEFPA.
Historiquement, les programmes de développement agricole entre la France et l’Arménie portés par le Fonds Arménien de France (FAF), association de loi de 1901 reconnue d’Utilité Publique, ont initié des actions de développement agricole créatrices d’activités économiques et d’emplois. Le FAF dispose d’équipes opérationnelles françaises sur le terrain. Le FAF, grâce au projet agropastoral du Tavush soutenu par le Conseil Départemental 92, a acquis une expérience certaine dans le domaine du développement rural depuis 15 ans. À l’initiative de Patrick Devedjian, ce projet a été initié en 2008. Il a permis de développer une ferme moderne pour l’Arménie et une fromagerie : La ferme de Lusadzor. Différentes évolutions ont été réalisées depuis. Le grand projet qui anime les membres du FAF est la création d’une école d’agriculture en référence aux lycées agricoles français avec l’appui si possible d’établissements agricoles, le soutien de la DGER et les financements entre autres de régions dont l’Île de France.
Une mission d’un groupe d’experts dont je faisais partie s’est déroulée en octobre 2021. Un partenariat entre le ministère de l’Éducation nationale arménienne et le FAF est acté avec la mise à disposition des locaux du collège régional professionnel d’Idjévan (capitale du Tavush) afin de créer un établissement de formation agricole. L’ouverture a eu lieu en septembre 2022. La ferme de Lusadzor devient de fait le lieu des travaux pratiques dispensés. Il est clair que les cursus mis en place dans le collège régional d’Idjévan et la ferme-école de Lusadzor feront partie d’un programme national de formations rénovées pour l’agriculture en Arménie dont bénéficieront toutes les régions d’Arménie si l’expérience est porteuse de sens et d’avenir. Une fondation a été créée entre le ministère de l’Éducation et le Fonds Arménien de France, co-présidée par le vice-président du Fonds. Le nom de Patrick Devedjian a été donné au collège régional d’Idjévan. Du fait de la crise Covid, les projets imaginés ont pris du retard. Depuis deux années scolaires, nous* avançons avec les équipes arméniennes d’enseignants et une directrice adjointe recrutée, je suis chargé du suivi des actions pédagogiques innovantes, de l’accompagnement professionnel et de la formation de la directrice adjointe Margarit Poghosyan.
* Jacques Bahry, expert spécialiste en formation continue et formations à distance, et moi-même.

Quelles sont les prochaines étapes de ce projet ?

Des missions d’expertise en Arménie sont proposées pour accompagner l’évolution du Collège régional d’Idjévan dans son offre de formation agricole. Trois axes sont retenus, le premier portera sur les évolutions pédagogiques des enseignements techniques en lien avec l’exploitation (apprentissages liés aux transitions agroécologiques) et l’atelier fromagerie ; le second se concentrera sur la vie scolaire d’un établissement basée sur la participation des jeunes, des partenaires selon des principes intégrant les notions de citoyenneté, d’éducation inclusive, de participation individuelle et collective et de démocratie ; enfin, le troisième axe prendra en compte, plus largement le développement territorial des métiers agricoles (installation des jeunes, formation continue des adultes, structures intermédiaires – filières – conseil en agriculture). Ainsi, pour participer à cette mission à l’automne 2024, enseignants d’agronomie ou zootechnie, directeurs d’exploitations agricoles, CPE, directeurs d’établissements pourront candidater à cet appel à manifestation d’intérêt.

Propos recueillis par Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI (Conseil Expertise Formation Agricole à l’International).

Contacts : Évelyne Bohuon, animatrice du réseau Arménie, evelyne.bohuon@educagri.fr
Stéphanie Mangin, chargée de mission Europe au BRECI/DGER, stephanie.mangin@agriculture.gouv.fr, Rachid Benlafquih, chargé de mission expertise à l’international au BRECI/DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr, Vanessa Forsans, animatrice du réseau CEFAGRI, vanessa.forsans@educagri.fr