Un diplomate japonais de retour en Alsace !

Monsieur Yusuke Kambayashi, premier secrétaire aux affaires agricoles de l’Ambassade du Japon en France, a donné une conférence sur l’agriculture et l’alimentation du Japon dans l’établissement agricole des Sillons de Haute Alsace sur le site du lycée du Pflixbourg.

Accueil du Premier secrétaire aux affaires agricoles à Paris, Yusuke Kambayashi à l’établissement agricole des Sillons de Haute Alsace sur le site du lycée du Pflixbourg

Après avoir présenté son parcours notamment avec un passage par l’Ecole Nationale de l’Administration française qui l’avait conduit une première fois en Alsace, Monsieur Kambayashi a expliqué les missions assurées par l’attaché agricole à l’Ambassade du Japon à Paris, notamment l’étude des bonnes pratiques dans les pays étrangers. Pour cela, la France est particulièrement intéressante à étudier.

Portrait de l’agriculture au Japon

Le Premier secrétaire a évoqué le vieillissement de la population au Japon et le besoin de chercher des marchés dans les pays étrangers pour maintenir la production japonaise, au risque de perdre des terres agricoles. Il a mentionné le plan stratégique d’exportation mis en place par le gouvernement. Pour l’instant, la France est plus exportatrice vers le Japon que l’inverse.

Il a évoqué un grand événement à Lyon à la Cité internationale de la gastronomie, dont il a été à l’initiative : un mois culinaire basé sur des démonstrations, ateliers, et ventes de produits japonais.

En tant que représentant du Japon en France, Yusuke Kambayashi a dressé un portrait de l’agriculture au Japon. Ainsi, la superficie du Japon représente la moitié de celle de la France avec peu de terres agricoles, soit 12% de surface agricole pendant qu’en France elle atteint 53%. En conséquence, le taux d’autosuffisance alimentaire du Japon de 38 % est très faible.

Le fonctionnement

Ensuite, Monsieur Kambayashi a précisé les spécificités de l’agriculture au Japon. Le riz y est cultivé dans les plaines qui sont peu nombreuses. La culture des fruits et légumes est répandue partout dans le pays. Cependant, le raisin est essentiellement cultivé dans le centre du Japon. La variété la plus populaire est le Koshu. Des Japonais sont allés étudier en France et surtout dans la région de Bordeaux où l’entreprise Suntory est propriétaire d’un château.

La culture des fleurs est assez limitée car le caractère timide des hommes Japonais n’encourage pas le commerce. Les fleurs sont surtout utilisées au fleurissement des cimetières.

On retrouve l’élevage de tous les animaux mais avec peu de chèvres. La race Wagyu, vache japonaise, s’est développée à l’extérieur du Japon notamment en Australie.

On assiste à une concurrence entre les différentes utilisations des terres (usines, habitations…), avec une forte pression pour l’artificialisation des terrains agricoles. Les travaux d’aplanissement des terrains dédiées à la riziculture fait partie des missions du Ministère en vue d’une meilleure efficacité des travaux. Parfois, ces parcelles travaillées sont adaptées à la construction de bâtiments (hôpitaux, etc…) et certains agriculteurs vendent leur terrain malgré une règlementation stricte qui vise à limiter l’artificialisation des terres.

En raison de la raréfaction des terres agricoles, les montagnes ont été investies et leur aménagement représente un coût important, sans compter les risques de glissements de terrain. Aujourd’hui l’activité agricole n’est pas concurrente par rapport aux produits importés. Beaucoup de terres agricoles sont aujourd’hui abandonnées et leur surface a tendance à baisser.

Même si la riziculture est populaire, elle est peu rentable. La tendance est à la baisse de consommation de riz en raison du changement de mode de vie de la population. L’importation de céréales du Canada, USA, France prend le pas sur la production locale. La culture du riz ne nécessite pas de travailler tous les jours mais le problème majeur du Japon est de renforcer les recrutements en main d’oeuvre agricole.

Le nombre d’agriculteurs est en forte diminution, majoritairement due au vieillissement de la population. En 2023, l’âge moyen des agriculteurs est de 67,8 ans !

La taille moyenne des exploitations est beaucoup plus petite qu’en France, en moyenne 15,2 ha contre 60,9 ha en France. Le Ministère travaille au regroupement des parcelles.

Les défis

Le changement climatique représente un autre défi majeur. Ainsi, un plan gouvernemental définit divers objectifs dans les secteurs agricoles, de la forêt et de la pêche pour s’y adapter.

Le Japon utilise beaucoup de pesticides mais traditionnellement, dans les rizières, ils sont peu utilisés en raison de la présence de l’eau. Dans les serres, les productions sont réalisées plusieurs fois par an, ce qui augmente le pourcentage d’utilisation des pesticides (comme aux Pays-Bas).

L’agriculture biologique représente actuellement moins d’1% des surfaces agricoles et en raison du climat, sa culture est difficile à opérer.  Les consommateurs ne choisissent pas ce type de produits car ils coûtent plus cher que les autres. Ils pensent également que les produits japonais représentent une forme de sécurité, par rapport aux produits bio importés.

La tradition comme patrimoine culinaire

La conférence s’est achevée par une présentation du Washoku, le repas traditionnel japonais. Il s’agit d’un plat complet traditionnel composé d’un bol de riz, de soupe de miso, et de 3 plats (1 viande et 2 légumes). Le Washoku a été inscrit en 2012 au patrimoine mondial de l’Unesco venant directement après la cuisine française. Depuis, les Japonais retrouvent le goût de cette tradition, surtout dans les restaurants scolaires. Chaque plat a un sens différent.

Monsieur Kambayashi a évoqué l’umami : le 5e goût au Japon, indépendant des autres (sucré, salé, amer, acide).

L’alimentation fermentée est une spécificité de la cuisine japonaise : miso, soja, radis jaune, saké (vin de riz fermenté). Il est peu développé en France, Yusuke Kambayashi travaille à son développement.

D’autres saveurs entrent dans la connaissance culinaire comme le wasabi, le wakame dont une filière bio existe en Bretagne (production durable car les algues poussent sans intervention humaine), l’azuki est un haricot rouge, production existant en Alsace.

A l’issue de la conférence, les élèves et les enseignants du lycée ont posé de nombreuses questions. La monoculture et l’épuisement des sols, l’origine de l’eau utilisée dans la culture du riz, l’agriculture biologique, les appellations d’origines protégées, la méthanisation et les aides à l’installation ont ainsi été abordées.

Yusuke Kambayashi ne s’est pas rendu au lycée du Pflixbourg-Wintzenheim par hasard. En effet, cet établissement est entré dans le réseau de la coopération avec le Japon en 2018 sous l’impulsion d’une enseignante en aménagements paysagers, Magali Dalloz. Aujourd’hui, ce lycée est un des établissements les plus actifs dans la coopération avec le Japon.

Article co-écrit par Franck COPIN animateur du réseau Japon et Hélène ZOUINKA chargée de communication de l’EPLEFPA « Les Sillons de la Haute-Alsace ».

Contact : Franck COPIN, animateur du réseau Japon de l’enseignement agricole, franc.copin@cneap.fr




Africains en BTSA et en service civique dans des établissements agricoles pendant le confinement

Si toutes les mobilités sont pour l’instant annulées ou reportées à cause de l’épidémie de COVID-19, une douzaine de jeunes africains continuent leur service civique dans plusieurs établissements agricoles et autant d’étudiants suivent leurs cours de BTSA tout en respectant les règles du confinement imposées par le gouvernement. Voici un tour d’horizon de leur vie en France.

Au LEGTA d’Auzeville (31), les Burkinabè Safiata et Adama poursuivent leurs missions liées à l’apiculture et au maraîchage. Les matinées se passent à la miellerie et les après-midi au potager :

Ces activités leur permettent de bien vivre leur confinement, d’autant plus qu’ils habitent une grande maison sur le vaste terrain de 10 ha du lycée. Et ils sont en contact téléphonique quasi quotidien avec leur tuteur, qui leur permet aussi d’utiliser une fois par semaine le téléphone du lycée pour appeler leurs familles au Burkina Faso.

Au LPA de Château-Gontier (53), Arthur, Ivoirien, continue son travail sur les insectes tandis que Jemima, Béninoise, ne pouvant poursuivre en cette période sa mission au Refuge de l’Arche (protection des animaux sauvages en captivité), travaille le matin à l’animalerie du lycée. Tous deux gardent le moral, confinés au lycée, comme l’un de leurs tuteurs, chef de l’atelier piscicole.

Au LPA de Vire (14), les Ivoiriens Chimène et Ernest sont en contact téléphonique très régulier avec leur tuteur et vont bien. Leurs activités d’ECSI sont annulées ou reportées mais ils assurent la traite en alternance avec le chef d’exploitation et le vacher, assistés du proviseur adjoint :

Ils ne se sentent pas isolés dans la mesure où le personnel de direction se montre très présent, logeant aussi sur l’établissement.

Il en va de même pour leurs compatriotes Oumar, au LPA de Velet (71) et Krystelle, au LEGTA de La Roche-sur-Yon (85). Cette dernière continue à travailler un peu sur l’exploitation (maraîchage bio) et apprend à conduire le tracteur et aussi à faire du vélo ; elle travaille sur son rapport de stage et profite des installations sportives. Elle a des contacts avec les personnels logés et confinés au lycée qu’elle croise ici et là, sans négliger les gestes barrières. Le chef d’exploitation notamment assure les courses, pour elle et pour Saadia, service civique marocaine.

Ranto, service civique malgache au LEGTA de Pau (64), lui, ne loge pas au lycée mais dans un foyer de jeunes travailleurs, où il tente de s’occuper au mieux, ayant forcément mis entre parenthèses sa mission de service civique.

Quant à la Sénégalaise Mbacké, elle devait terminer sa mission de service civique à l’EPLEFPA de Montmorot (39) le 28 mars. Mais en accord avec sa tutrice, son ONG d’origine (Nebeday) et France Volontaires, elle a pu rentrer prématurément dans son pays. Désormais au Sénégal donc, elle s’impose un confinement de quatorze jours minimum et garde un très bon souvenir des quelques mois passés en France.

Enfin, les Béninois Kévin et Flavien ont préféré, dès l’annonce de la fermeture de l’établissement, quitter le LEGTA Le Chesnoy (45) pour passer ce temps de confinement chez leur ami tarn-et-garonnais, agriculteur retraité membre de l’association CUMA-Bénin, qui les a déjà accueillis pendant les vacances scolaires. Ils sont heureux et ne s’ennuient pas, dans un large espace rural où ils effectuent diverses tâches leur permettant d’utiliser quelques machines :

En outre, pour les étudiants africains en BTSA, la situation est quelque peu différente de celle des services civiques étant donné qu’ils ne sont pas logés dans les lycées et qu’il leur faut suivre les cours à l’instar de leurs camarades de classe.

Au LEGTA de Limoges (87), Athène et Pathé, Sénégalais en BTSA TC, se portent bien et se débrouillent pour suivre les cours à distance, dotés d’ordinateurs pour recevoir les cours et exercices d’application via Pronote. Néanmoins ils disent vivre difficilement le confinement qui les isole davantage qu’en temps normal.

Bamba, Aïcha et N’gone, les trois Sénégalais en BTSA APV au LEGTA de Châteauroux (36) bénéficient comme leurs camarades de la continuité pédagogique mise en place par l’établissement, à travers une liste Snapchat et via Pronote. Bamba en témoigne : Inquiet par rapport à ses revenus quand le McDo où il travaille après les cours a fermé, il se trouve désormais rassuré par la possibilité de bénéficier du chômage partiel. Et il envisage par ailleurs de se faire embaucher par un agriculteur pour les deux semaines de vacances à venir.

Les jeunes africains en service civique et en BTSA sont donc en bonne santé ; la continuité de l’accueil est assurée pour eux, grâce à l’attention des tuteurs, enseignants et personnels de direction (chefs d’établissement, d’atelier, d’exploitation) qui veillent à l’organisation de l’activité ou au suivi pédagogique comme au confort de la vie quotidienne. Tous contribuent à la lutte collective contre le COVID-19 en respectant au mieux le confinement.

Contacts :

Vanessa FORSANS, Jean-Roland ARBUS, co-animateurs du réseau Afrique de l’Ouest, vanessa.forsans@educagri.fr, jean-roland.arbus@educagri.fr

Rachid BENLAFQUIH, Chargé de mission Afrique / Éducation à la citoyenneté et à la solidarité internationale / Expertise internationale au BRECI-DGER, rachid.benlafquih@agriculture.gouv.fr