Séminaire du réseau international FAR-Formation Agricole et Rurale à Meknès : une occasion de réfléchir à l’enseignement de l’agroécologie et des transitions au Maroc.
Les 6, 7 et 8 octobre 2025, le réseau international FAR a rassemblé à l’École Nationale d’Agriculture de Meknès (ENAM) les représentants des réseaux nationaux FAR formels ou informels de 19 pays africains à Meknès pour échanger sur les formations aux transitions et à l’agroécologie. D’importantes délégations françaises et marocaines ont participé aux différents ateliers, tables-rondes et conférences, comprenant des représentants des ministères en charge de l’agriculture, des responsables d’établissements de formation agricole technique et supérieure, des enseignants et enseignants-chercheurs, des représentants professionnels ainsi que des acteurs associatifs du milieu rural.
Le séminaire a mis en lumière de nombreuses initiatives récentes des différents pays dans le champ des formations à l’agroécologie et aux transitions et l’importance de la coopération pour innover dans le secteur.
L’agroécologie en marche dans l’enseignement agricole marocain
Mme Bouchra Chorfi, directrice de l’enseignement, de la formation et de la recherche (DEFR) au ministère de l’Agriculture marocain a rappelé en introduction du séminaire que la stratégie agricole marocaine, « Génération Green 2020-2030 », accorde une importance primordiale à la formation des ruraux et au développement d’une agriculture durable et résiliente.
Cette orientation a été mise en œuvre ces dernières années au Maroc à travers notamment la mise en place d’un Centre national pour l’initiative en agroécologie à Meknès, support de travaux de recherche menés de manière collaborative avec l’Institut Agro de Montpellier et l’École Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel (ENSETP) de Dakar.
De plus, la généralisation d’un module d’initiation à l’agriculture biologique et à l’agro-écologie est active dans toutes les filières d’enseignement agricole.
Le développement d’une véritable filière d’ingénieurs en Agroécologie est inscrite à l’Ecole Nationale de l’Agriculture à Meknès. Depuis 3 ans, l’ENAM est engagée à former des ingénieurs en mettant l’accent sur la conservation des sols et le fonctionnement systémique des milieux agricoles, véritables composantes des écosystèmes.
De même, la généralisation d’un module d’initiation à l’agriculture biologique et l’agroécologie dans les formations professionnelles sont orientées vers la production végétale comme animale.
D’ailleurs, en juillet 2025, une formation qualifiante en agriculture biologique a été lancée dans l’objectif de former 250 personnes par an.
En outre, un réseau d’échanges entre établissements français et marocains a été mis en place sur le thème des formations aux transitions agroécologiques (Réseau pour l’Innovation et la Professionnalisation en Agriculture Durable (RIPAD)).
Au-delà de la mise en place de structures et de programmes, des interrogations sont communes à tous les pays sur la pédagogie des transitions.

Le séminaire a été l’occasion d’échanger entre participants sur les questions de pédagogie posées par la mise en œuvre des formations aux transitions et à l’agroécologie. La présentation introductive de Stéphane de Tourdonnet, directeur du département « Milieux, productions, ressources et systèmes » à l’Institut Agro Montpellier, a souligné les difficultés à enseigner des connaissances nouvelles, souvent non stabilisées, à expérimenter dans de nouveaux contextes en mutation permanente et accélérée par l’emballement du changement climatique. Robustesse et résilience des systèmes sont en effet plus complexes à appréhender et à mesurer que rendement et marge brute des cultures !
Les ateliers qui ont suivi et les présentations sous forme de posters commentés de 16 initiatives conduites en Afrique et ailleurs ont permis aux 200 participants d’échanger sur leurs expériences de formation aux transitions et à l’agroécologie. L’importance d’une pédagogie active permettant aux jeunes de construire leur savoir par l’expérimentation et la conduite de mini-projets a constitué le fil rouge de nombreuses présentations.
Les plans « Enseigner à produire autrement » I et II et leur mise en œuvre dans les établissements français ont fait l’objet de nombreux échanges grâce à Christian Candalh (IEA), Clélia Berger-Cluzel (EPN de Mayotte), Domitille de Clerq (EPLEFPA de Cibeins), Guillaume Fichepoil, David Lacaille et Alexy Spangel (EPLEFPA du Valentin), Jean-Claude Gracia et Jean-Pierre Del Corso (ENSFEA), qui ont pu présenter les actions variées entreprises au niveau national ou dans leur établissement.
Les réseaux FAR nationaux associent acteurs de la formation agricole publics et privés et acteurs du développement agricole de nombreux pays d’Afrique. La présence d’acteurs du développement venant de différents pays a permis d’élargir les réflexions autour du développement de l’agro-écologie à la formation continue des agriculteurs et au conseil aux exploitations agricoles, mettant en évidence la nécessité d’avoir des interventions plus individualisées et moins prescriptives.
La coopération internationale, un outil puissant pour faire avancer les réflexions
Le travail en coopération entre établissements français et africains sur les questions de formation à l’agroécologie et aux transitions a également pu être présenté et
discuté grâce à la présence au séminaire de Vanessa Forsans et William Gex, animateurs du Réseau Afrique de l’Ouest et Afrique centrale de la DGER, Jan Siess, animateur du Réseau Maroc de la DGER, Nadine Zorzi et Philippe Nauleau (EPL Nature de La Roche sur Yon), Diane Ravit et Guilhem Heranney (EPLEFPA Terre d’horizon) et Vincent Vertes (Campus Terre et Nature de Carcassonne).
L’occasion d’illustrer la richesse et la diversité des types d’échange possibles : visites d’étude, échanges de pratiques pédagogiques et de contenus entre formateurs, stages individuels ou collectifs de jeunes, conception commune de serious games,… Les établissements français impliqués dans le réseau RIPAD présents au séminaire (Institut Agro Montpellier, EPLEFPA de Romans sur Isère, Campus Terre et Nature de Carcassonne, EPLEFPA Le Valentin) ont échangé avec leurs partenaires marocains en bilatéral. Une réunion de ce réseau en marge du séminaire a ainsi mis en évidence le souhait partagé d’ouvrir le réseau à de nouveaux établissements et à de nouveaux sujets (élevage durable, gestion de l’eau…).
Un séminaire tremplin pour des actions élargies
Le séminaire du réseau international FAR a été l’occasion à la fois de contribuer aux réflexions africaines sur l’enseignement de l’agroécologie et de permettre aux établissements membres du réseau RIPAD de replacer ses actions de coopération entre établissements dans un paysage plus vaste, celui de l’évolution des dispositifs de formation et de conseil agricole à l’échelle du continent africain.
Au Maroc, un réseau national FAR formel est en cours de constitution. Il permettra d’échanger sur les initiatives locales menées par la société civile, foisonnantes mais disparates, sur les nombreuses évolutions en cours du dispositif public de formation et de conseil agricole et de capitaliser les expériences. Le réseau RIPAD pour sa part est amené à se développer et à étendre son champ d’activité. Tous les participants marocains présents au séminaire, et accompagnés en cela par la force du Réseau FAR semblent être prêts à relever le défi et à prendre leur part dans la mise en œuvre urgente de ces pratiques durables.
Les plus belles pages sont donc certainement celles qui restent à écrire.
Lire aussi l’article sur le RIPAD, un nom à retenir en méditerranée
Consulter les ressources de FAR, Livret de contribution sur 43 initiatives de formation en Afrique et ailleurs pour accompagner les transitions
Article proposé par Jan Siess et Bertrand Wybrecht
Illustration de tête d’article – Crédit : Julien Revenu, dessinateur en facilitation graphique
Contact : Jan Siess, animateur du réseau Maroc de l’enseignement agricole – jan.siess@educagri.fr, Bertrand WYBRECHT, Conseiller agricole adjoint à l’ambassade de France à Rabat

